LES ADIEUX DE MARIE STUART, WWV 61

L’œuvre musicale de Richard Wagner est composée d’opéras ou “drames musicaux” allant des “Fées” (Die Feen) à “Parsifal”. Une présentation détaillée de chacune de ces œuvres majeures est ici associée à un ensemble d’articles thématiques, replaçant celles-ci non seulement dans le contexte de sa vie personnelle mais également dans son contexte social, économique et culturel. Cette section regroupe également l’ensemble des œuvres musicales (hors opéra) et son œuvre littéraire.

LES ADIEUX DE MARIE STUART, WWV 61, mélodie pour voix de femme et piano

Les adieux de Marie Stuart, WWV 61

Adieux de Marie Stuart (« Adieu, charmant pays de France« ),
mélodie pour voix féminine et piano, WWV 61
(composée en 1840)
sur un texte français de J. P. de Beranger (trans. Boruttau)

 

Lorsque Wagner arrive à Paris en septembre 1839, avec sa femme et un énorme Terre-Neuve, les reines anglaises et écossaises sont en vogue. La tragédie Maria Stuart de Schiller de 1800 a jeté une ombre importante. Donizetti a écrit un opéra Maria Stuarda, basé sur cette tragédie, en 1834, mais la censure l’a interdite après sa répétition générale à Naples. Son Roberto Devereux – qui mettait en scène les amours romancés entre Elizabeth I et le comte d’Essex – a été produit au Théâtre Italien de Paris le 17 décembre 1838. Anna Bolena de Donizetti, si elle n’est pas une reine, est représentée à 25 reprises à l’Italien pendant la saison 1834. La pièce de Victor Hugo Marie Tudor est un échec en 1833, bien que Berlioz, qui avait assisté à une lecture privée, avait envisagé de composer une symphonie dans la veine de la Fantastique pour chœur et orchestre avec alto obligé, qui se serait intitulée Les derniers instants de Marie Stuart. Si celle-ci s’est métamorphosée en Harold en Italie (1834) et en Roméo et Juliette (1838-1839), sa création témoigne néanmoins d’un certain « quelque chose dans l’air ». C’est un air que Wagner, sensible à tous les courants artistiques, respire avidement, malgré son pauvre français. S’il s’était lancé dans la composition de Rienzi, il n’avait jusqu’alors composé que quelques ouvertures  et Das Liebesverbot, une oeuvre de jeunesse qui durait trois heures, avec laquelle il pensait aller à l’attaque de »la ville de lumière ». Après avoir accepté de mettre en scène  Das Liebesverbot au printemps 1840, le Théâtre de la Renaissance fit faillite. Une audition de plusieurs de ses numéros à l’Opéra de Paris ne recueillit qu’un qualificatif de « charmante » et un refus poli. Pour subvenir à ses besoins, Wagner s’engage dans un travail de fourmi colossal, aimablement fourni par l’éditeur de musique et propriétaire de la Gazette musicale, Moritz (plus tard, Maurice) Schlesinger. La rémunération des arrangements pour piano de La Favorite et de L’elixir d’amour de Donizetti, par exemple, ou de La reine de Chypre et de La Guitarrero de Halévy, est une bataille perdue d’avance avec des dettes croissantes alors que Wagner persévère avec Rienzi. Contraint de travailler à plus petite échelle, il a recours à la composition de mélodies pour gagner de l’argent et pouvoir en emprunter. La première de ces mélodies est la traduction française des Deux Grenadiers de Heine – y incluant le passage enthousiaste de la Marseillaise. CIl doit alors à Schlesinger l’impression de la partition, obligeant Wagner à payer avec des articles pour la Gazette musicale. Plusieurs autres sont également composées pour attirer l’opinion populaire, dont elles ne bénéficieront que dans une faible mesure, comme Les Adieux de Marie Stuart, composé en 1840, prenant comme texte le célèbre poème de Béranger.

Texte original de la mélodie (originale en français) :

Adieu, charmant pays de France
Que je dois tant chérir!
Berceau de mon heureuse enfance,
Adieu! Te quitter c’est mourir!

Toi que j’adoptai pour patrie
Et d’où je crois me voir bannir,
Entends les adieux de Marie,
France, et garde son souvenir.

Le vent souffle, on quitte la plage,
Et peu touché de mes sanglots,
Dieu, pour me rendre à ton rivage,
Dieu n’a point soulevé les flots!

Lorsqu’aux yeux du peuple que j’aime,
Je ceignis les lis éclatants,
Il applaudit au rang suprême
Moins qu’aux charmes de mon printemps.

En vain la grandeur souveraine
M’attend chez le sombre Écossais;
Je n’ai désiré d’être reine
Que pour régner sur des Français.

France, du milieu des alarmes
La noble fille des Stuarts,
Comme en ce jour, qui voit ses larmes,
Vers toi tournera ses regards.

Mais, Dieu! le vaisseau trop rapide
Déjà vogue sous d’autres cieux;
Et la nuit, dans un voile humide,
Dérobe tes bords à mes yeux!

Adieu, charmant pays de France
Que je dois tant chérir!
Berceau de mon heureuse enfance,
Adieu! Te quitter c’est mourir!

 

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