LA VILLA DE RICHARD WAGNER A LA BRIENNERSTRASSE DE MUNICH
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par Luc ROGER
La Villa de la Briennerstrasse
Richard Wagner, invité du Roi Louis II de Bavière, s’installa dans sa villa munichoise au 21 de la Briennerstraase.
Cette villa a aujourd’hui disparu. Sur son emplacement (au numéro 37 de la même rue, la numérotation ayant changé au fil du temps) s’élève aujourd’hui une haute école munichoise. De cette villa et de son parc ne restent qu’une plaque commémorative dont l’entretien laisse quelque peu à désirer.
Wagner prit possession des lieux le 15 octobre 1864.
Oliver Hilmes évoque l’installation du compositeur dans on ouvrage consacré à Cosima : « En octobre 1864, Richard Wagner quitte la maison Pellet, au bord du lac de Starnberg, et partit s’installer à Munich. Au numéro 21 de la Brienner Strasse, il aménagea dans une villa de maître mise à sa disposition par Louis II. Il vivait désormais juste à côté de la Königsplatz, [la Place Royale ]dans le quartier résidentiel le plus huppé de Munich, face à ce qu’on appelait le « Propylée » et à la Glyptothèque. La nouvelle demeure de Wagner n’était pas moins élégante que son environnement: ce palais urbain de deux étages, avec son avancée caractéristique en encorbellement, offrait beaucoup d’espace au nouveau maître des lieux, et le jardin aux allures de parc invitait, l’été, à sortir prendre l’ombre sous les vieux arbres.
Au centre de l’étage supérieur, se trouvait une grande salle destinée aux fêtes et aux réceptions; c’est là que se trouvait le piano Érard de Wagner. A droite, une porte donnait sur le sanctuaire du compositeur ce que l’on appelait la « chambre de l’Atlas ». Les rares élus autorisés à entrer dans cet espace de travail en étaient généralement subjugués.
Ce que Wagner avait créé ici tenait de la symphonie de lumières, de couleurs, de velours et de satin. Les murs étaient tendus de soie jaune de l’Atlas, les rideaux en soie rouge de la fenêtre baignaient la pièce d’une lumière chaude. Partout on trouvait des draperies, des roses artificielles, des décorations en tissus précieux, comme du damas et du satin, et au milieu de la salle un canapé de moiré fleuri. Ce débordement de luxe reflétait l’idée que Wagner se faisait de lui-même […] »
in Oliver Hilmes, Cosima Wagner, la maîtresse de la colline, Perrin, 2012.
Wagner fit venir sa « marchande de modes » viennoise, Bertha Goldwa et son équipe de décorateurs à Munich pour qu’elle décorât sa villa avec des soies, des damas, des satins et des dentelles. Wagner exigeait un niveau de confort digne d’un potentat oriental. Une des pièces principales fut d’ailleurs baptisée la « pièce de satin »: les murs étaient tendus de satin jaune, du satin rose couvrait les alcôves à chaque coin de la pièce, le plafond était entouré de ruchés gris-perle et de roses artificielles. Le sol était couvert de coûteux tapis de Smyrne.
La facture de Bertha Goldwag pour les travaux munichois s´éleva à 10000 guldens, que dut payer le roi Louis II de Bavière, dont Wagner était l’invité. Ces débauches de luxe firent jaser les Munichois, ulcérés de ces magnificences qu’il leur semblait payer.
On surnomma Wagner le « Lolus » du Roi Louis II, allusion à la Lola du Roi Louis Ier, la fameuse danseuse Lola Montez que le grand-père de Louis II avait couverte de présents, publiquement entretenue et alla jusqu’à anoblir. Il y eut des émeutes, Louis Ier abdiqua. Louis II et ses conseillers craignant que la même situation se reproduise préférèrent conduire le compositeur vers l’exil.
Le voisinage
Voici la vue sur la Place Royale avec le Propylée et la Glyptothèque qu’avaient fait ériger Louis Ier, le grand-père du Roi Louis II, transformant Munich en Athènes du Nord. Richard, se promenant sous les noyers de son jardin ou des fenêtres de sa villa pouvait contempler ces merveilles. Il faut imaginer la villa de Wagner juste à l’avant-plan droit de l’image. la villa et le parc faisant l’angle de la Briennerstrasse et de la Luisenstrasse.
Le voisin immédiat de Richard Wagner était le Comte Friedrich von Schach (Adolf Friedrich Graf von Schack), un juriste et diplomate né à Schwerin en 1815 et qui travailla au service du Mecklembourg jusqu’en 1851, un poste qu’il remit alors pour se consacrer entièrement à ses intérêts littéraires. C’est le Roi Maximilien II de Bavière, un Roi ami des sciences et des lettres, qui l’invita à Munich en 1856. Ecrivain, poète, grand connaisseur de la littérature orientale et espagnole, le Comte von Schack, passionné de voyages, réunit aussi une importante collection d’oeuvres d’art dans les années 1860-1870. En 1864, la villa Schack de la Briennerstrasse côtoyait la villa de Wagner et le Comte abritait sa collection dans un pavillon de son jardin construit spécialement à cet usage.
Les deux hommes devinrent amis et se rendaient mutuellement visite. Feu Martin Gregor-Dellin précisait dans sa biographie de Wagner (Richard Wagner: Sein Leben. Sein Werk. Sein Jahrhundert, Piper Verlag) que Wagner et Schack s’entretenaient de littérature: ils conversaient de Calderón, d’August von Platen ou de Firdousi.
Le biographe de Wagner signale aussi l’intérêt que portait Wagner à la gravure de Bonaventura Genelli représentant Bacchus entouré des Muses, que possédait le Comte, et que Wagner connaissait par une aquarelle qu’il avait souvent vue chez son beau-frère, Friedrich Brockhaus.
A noter que le Comte avait ouvert sa collection au public dès 1866. En 1871, il se porta acquéreur du terrain jouxtant sa villa et engagea l’architecte Lorenz Gedon à lui construire ce qui fut connu sous le nom de Palais Schack, qui fut réalisé en 1877. Ce palais fut détruit pendant la seconde guerre mondiale. La collection avait été bien auparavant déplacée, en 1909, par ordre du Kaiser dans un bâtiment de la Prinzregentenstrasse, où elle se visite aujourd’hui.
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Sommaire
Le saviez-vous ?
Quel compositeur aurait dit de Wagner : « Pour moi, Wagner est impossible ; c’est certes un homme d’esprit, mais il parle à n’en plus finir. On ne peut pas discuter avec lui ».
Voir la réponse
Réponse : Robert Schumann. Wagner, quant à lui, raconte : « Nous sommes en bons termes en apparence ; mais on ne peut pas fréquenter Schumann... Peu après mon arrivée à Paris, je lui ai rendu visite, je lui ai raconté une foule de choses intéressantes... Schumann me regardait toujours sans bouger ou regardait en l'air et ne disait pas un mot. Alors je me suis levé d'un bond et je me suis enfui. »