L’histoire de Cosima pourrait se résumer ou plutôt se retrouver dans chacun de ses noms. Cosima Liszt, Cosima épouse von Bülow, Cosima Wagner, Cosima Veuve Wagner : on pourrait écrire une biographie de chacune d’elles et les portraits ne se ressembleraient pas. Tout à tour fille de l’un des musiciens les plus célèbres et brillants (mais également des plus séducteurs) de son temps, épouse d’un studieux (mais ombrageux) chef d’orchestre admiratif du compositeur sans doute le plus charismatique de son entourage, maîtresse puis épouse et finalement veuve de ce même compositeur, Richard Wagner. Mère des enfants que n’avait pu lui donner Minna en premier mariage, Cosima fut, auprès de celui qu’elle révérait déjà enfant comme un dieu, une épouse les plus dévouées mais également un des piliers les plus solides du wagnérisme… jusqu’à parfois adopter une rigueur absolue dans l’admiration qu’elle portait à l’art de Richard Wagner pour le moins déroutante !
Une fratrie illégitime
Née à Côme, Cosima Francesca Gaetana est la fille illégitime de Marie d’Agoult (Marie Catherine Sophie de Flavigny, comtesse d’Agoult), femme de lettres française connue sous le pseudonyme de Daniel Stern, particulièrement vive et brillante, et de Franz Liszt, célèbre compositeur et pianiste virtuose, de six ans son cadet. Contrairement à ce qu’on a parfois écrit, le prénom de Cosima ne fut pas choisi parce qu’elle était née près du lac de Côme, mais en l’honneur de Saint Cosmas, saint patron des médecins et des pharmaciens. Cosima reçoit le sacrement du baptême deux jours après sous les prénoms de Francesca Gaetana Cosima, des mains du prêtre Pietro Cavadini ; le parrain est Luigi Mortier de Milan, de nationalité belge et résidant à Bruxelles, professeur de musique de son état, la marraine est son épouse, nommée Eufrasia Mortier.
La complexité qui entoura la naissance de Cosima peut expliquer certains traits de son caractère.
Sa mère, Marie, était la fille d’Alexandre Victor François de Flavigny, noble français catholique et de Maria Elisabeth Bethmann, issue d’une vieille famille patricienne allemande protestante. Élevée entre la France et l’Allemagne, entre catholicisme et protestantisme, elle eut deux filles de son époux, le comte d’Agoult : Louise et Claire (qui épousa le Marquis de Charnacé). C’est la mort de sa fille aînée Louise qui décida Marie à tout abandonner pour s’enfuir avec son amant Franz Liszt. Leur relation, passionnée, compliquée, faite de ruptures et réconciliations, fut résumée par George Sand par l’expression « galériens de l’amour ».
Liszt et Marie d’Agoult (surnommée Arabella) eurent trois enfants : Blandine, appelée “Mouche”, future épouse d’Émile Ollivier, Cosima et Daniel qui mourut à vingt ans.
La liaison qui unit Marie d’Agoult à Franz Liszt se dégrada assez vite et agonisa longtemps. Quand ils se séparèrent en avril 1844, Liszt confia leurs enfants à sa propre mère, Madame Anna, ancienne femme de chambre à Vienne, et interdit à Marie de les voir. Les Flavigny, quant à eux, ne voulurent jamais entendre parler de cette progéniture illégitime et Marie ne participa pas financièrement à l’entretien des enfants.
Dans cette enfance quelque peu chaotique, Cosima donna tout son amour à sa sœur et son jeune frère, et porta aussi un amour très fort à ce père qu’elle ne voyait presque jamais, alors qu’elle vouait presque de la haine à cette mère qui n’avait pas le droit d’intervenir dans leur éducation. Liszt par ailleurs, aussi séducteur en société qu’il était brillant musicien, ne se privait pas de multiplier les conquêtes féminines.
Un rapport entre le père et la fille qui se compliqua encore lorsque Carolyne von Sayn-Wittgenstein entra dans la vie de Liszt. Voulant effacer toute influence possible de Marie d’Agoult, elle décida d’abord d’éloigner les enfants de l’affectueuse sollicitude de leur grand-mère pour les confier à une sévère gouvernante (Madame de Patersi de Fossombroni), de 1850 à 1855. Sous l’influence particulièrement rigide de celle-ci combinée à l’éducation prodiguée par l’abbé Gabriel, les deux sœurs apprirent et se résolurent à l’idée que “toute la vie [d’une femme] ne devait être qu’un sacrifice et qu’elle ne devait être qu’une hostie vivante” . Les notions de martyre, de sacrifice et de devoir s’installèrent dès lors dans la vie de Cosima.
En automne 1853, pour la première fois depuis neuf ans, les enfants de Liszt revirent finalement leur père. Liszt reçut Wagner “chez” ses filles, qui passèrent ainsi de l’isolement et la rigueur la plus absolue à la société la plus brillante. Cosima, affolée, ne leva pas les yeux de la soirée.
Mais toujours jalouse du moindre lien possible entre Marie d’Agoult et ses filles, la princesse décida Liszt en septembre 1855 à envoyer les jeunes filles à Berlin sous la garde de Franziska von Bülow, mère de Hans, le futur époux de Cosima.
La jeune Cosima qui portait en elle plusieurs cultures, elle-même miroir vivant ne réfléchissant que trop les conflits de ses ascendants, se mura dans une timidité des plus extrêmes qui cachaient à grand peine les déchirures de sa belle âme romantique.
Un mariage de raison
Cosima épousa Hans von Bülow, jeune chef d’orchestre, compositeur, élève de son père et déjà fidèle wagnérien à l’âge de dix-neuf ans, en 1857. Pourquoi l’épousa-t-elle ? Elle ne l’aimait pas et c’était bien là un mariage de raison. Leurs fiançailles toutefois furent des plus romanesques : le 19 octobre 1855, soit six semaines après l’arrivée de Cosima et Blandine à Berlin, Hans von Bülow devait diriger lors d’un concert l’ouverture de Tannhaüser. Déjà l’ombre du géant Wagner flottait au-dessus du couple…
Au cours de ce concert particulièrement éprouvant pour le jeune chef d’orchestre, celui-ci, hué et sifflé par le public, se retira dans sa loge, victime d’une attaque de nerfs. Rentrée avec Franzisca von Bülow, Cosima attendit le jeune maître jusqu’à son retour, et passa le reste de la nuit à le consoler. Et c’est dans ce contexte que les fiançailles se firent.
À la nouvelle de cette future union, Franz Liszt, d’abord réservé, donna finalement sa bénédiction : Hans, qu’il considérait déjà comme son fils spirituel, allait devenir son gendre. Satisfait de la sagesse de sa fille cadette, il lui témoigna l’affection dont elle avait tant besoin. Au contraire irrité par la force de caractère de Blandine, qui avait décidé de retourner à Paris, il resta longtemps d’une grande froideur envers elle. (NB : Leurs rapports ne s’améliorèrent qu’après son mariage avec Emile Ollivier. Pour autant, elle n’entretint pas de meilleurs rapports avec sa mère que Cosima).
Quant à Hans, il n’était pas d’une délicatesse avérée. Sujet à des problèmes de santé qui le rendaient nerveux, il heurtait la sensibilité de Cosima. Mais celle-ci (le devoir, toujours le devoir) n’aurait su le moins du monde sourciller. A peine mariés, et alors qu’ils devaient partir en voyage de noces, von Bülow et sa toute jeune épouse se retrouvèrent chez les Wesendonck, car Wagner avait besoin du jeune chef d’orchestre, et quand Wagner l’appelait, von Bülow arrivait. Une scène d’une anthologie particulièrement singulière devait se dérouler : Wagner déclamait les vers du poème de son futur Tristan et Isolde, von Bülow était au piano. Autour de ce duo d’exception, trois femmes : Minna, abrutie par les effets du laudanum était absente par l’esprit de ce qui pouvait bien se tramer, Mathilde Wesendonck regardait son poète avec la fièvre de l’extase dans ses yeux, et, Cosima, dans un coin de la pièce pleurait… Déjà… Si l’on ajoute à ce tableau, la présence d’un premier mari trompé (Otto Wesendonck), il ne saurait être de scène plus emblématique de l’amour et des rapports compliqués que ces êtres allaient entretenir pendant près des vingt années qui allaient suivre !
Outre ce mariage décevant, déjà placé dans l’ombre de Wagner, Cosima perdit les deux personnes qui comptaient le plus pour elle : son jeune frère Daniel, qui mourut en 1859, et sa sœur Blandine qui décéda en 1862. En leur mémoire, elle nomma sa fille née en 1860 Daniela, et celle née en 1863 Blandine. Non décidément, ce premier mariage avec von Bülow n’était pas placé sous une bonne étoile.
Pendant toutes les années passées auprès de Hans von Bülow, Cosima observa. Elle observa Wagner à qui elle vouait déjà une grande admiration, alors même que lui dans un premier temps ne vit en elle qu’une enfant, très (trop?) réservée. Elle fut témoin des histoires d’amour du compositeur, elle assista aux difficultés de son premier mariage.
Peu à peu leurs sentiments évoluèrent. Cosima, mariée et mère de deux enfants, et Wagner, son aîné de 24 ans, marié lui aussi, s’avouèrent en larmes leurs sentiments. Ce fut le début d’une liaison qui fit couler beaucoup d’encre…
Une liaison coupable, une femme meurtrie par le poids de la culpabilité et la vindicte populaire
Pendant plusieurs années, le couple essaya de sauver les apparences et nia l’évidence, avec l’aide du mari trompé. En effet, cette relation amoureuse était particulièrement compliquée. Outre les enjeux pour Cosima, que la bonne société ne pouvait que rejeter, elle mit en question de nombreuses relations.
Ainsi, Cosima et Hans : le couple feignit pendant plusieurs années de toujours s’entendre. Hans von Bülow endossa ainsi la paternité des deux filles illégitimes que Cosima eut avec Richard Wagner. Il tenta même d’utiliser Daniela et Blandine, qu’il retint près de lui, pour faire revenir Cosima.
Wagner et Hans : le compositeur continuait à voir en von Bülow un chef d’orchestre dévoué, et le fait est, l’époux délaissé restait fidèle à Wagner. Il dit même à Cosima “Je pardonne”, à quoi elle répondit “il ne faut pas pardonner, il faut comprendre”.
Cosima et Liszt : pendant plusieurs années, Liszt coupa toute relation avec sa fille. Il ne lui pardonnait pas d’avoir déserté son foyer. Les rapports ne s’améliorèrent pas le jour où Cosima se convertit au protestantisme : l’abbé Liszt en garda quelques aigreurs. Pendant toutes ces années de silence, c’est auprès de Daniela, sa petite-fille préférée, que Liszt prit des nouvelles.
Liszt et Wagner : si Liszt sut séparer l’homme Wagner du compositeur, il n’en fut pas de même pour Wagner qui le critiqua beaucoup et assez violemment auprès de Cosima, qui en pleura beaucoup. Ce fut peut-être le plus grand point de divergence dans le couple.
Louis II : le souverain, lorsqu’on lui rapporta les rumeurs qui couraient sur Wagner et Cosima von Bülow, demanda des comptes et crut en les dénégations outragées du compositeur et de l’épouse fidèle du chef von Bülow. Leurs dénis, leurs protestations d’innocence compliquèrent singulièrement les rapports entre l’artiste et le mécène.
Pendant que Louis II fournissait à Wagner une première demeure provisoire sur le lac de Starnberg (Villa Pellet),von Bülow se voyait offrir un poste de « pianiste royal ». Ainsi le pianiste et son épouse Cosima vécurent à Munich, dans une maison voisine de celle de Wagner. Les apparences étaient sauves et Cosima pouvait officiellement travailler en tant que secrétaire du compositeur.
En juin 1864 Cosima passa plus d’une semaine seule avec Wagner au lac de Starnberg, avant que von Bülow ne les rejoignent. Selon la gouvernante de Wagner, Anna Mrazek, « il était facile de dire que quelque chose se passait entre Frau Cosima et Richard Wagner« .
Neuf mois après cette visite, le 10 Avril 1865, Cosima donna naissance à une fille, Isolde, que von Bülow reconnut. Le 10 Juin 1865, soit deux mois seulement après cette naissance, von Bülow dirigea la création de Tristan et Isolde à Munich.
La position de Wagner à la cour de Louis II devint rapidement difficile. Ses recommandations politiques, ses exigences toujours plus pressantes concernant l’édification, d’un Festtheater spécialement dédié à la création de ses œuvres, ses goûts tapageurs en matière d’ “art de vivre” qu’il ne cachait pas le moins du monde aux yeux du public, lassaient le gouvernement bavarois. En décembre 1865, le roi dut à contrecœur faire quitter la Bavière à Wagner. Après quelques mois, en Mars 1866, Wagner arriva à Genève, où Cosima le rejoignit. Ils voyagèrent ensemble à Lucerne et trouvèrent une grande maison au bord du lac des quatre-cantons, à Tribschen.
Immédiatement, Wagner invita le couple von Bülow et leurs enfants. Après l’été, Hans von Bülow partit pour Bâle tandis que Cosima restait à Tribschen. Wagner, soucieux d’éviter à Cosima un scandale public, demanda à Louis II de faire taire les “racontars”, via une déclaration en Juin 1866 qui certifiait l’innocence de Cosima.
A ce moment, Cosima attendait un autre enfant de Wagner ; ce fut une fille, Eva, qui naquit à Tribschen le 17 Février 1867. Pendant ce temps, Hans von Bülow préparait la première des Maîtres Chanteurs qui se tint le 21 Juin 1868 et eut, plus qu’un succès, un retentissement mondial !
En octobre 1868 Cosima demanda à son mari le divorce, ce qu’il refusa. Mais en Juin 1869, immédiatement après la naissance de son troisième et dernier enfant de Wagner, Siegfried, Cosima écrivit à von Bülow et obtint cette fois son accord pour divorcer. Comme la pauvre Minna était décédée en 1865, Richard et Cosima purent se marier à Lucerne, le 25 Août 1870, dans une église protestante.
Le 25 décembre, le jour où Cosima célébrait son anniversaire même si elle était née le 24 , elle se réveilla au son de la musique. Richard avait en effet mis en place son orchestre sur les escaliers, et fit jouer ce qui est devenu connu sous le nom de Siegfried Idyll.
Une mère et une épouse dévouée
Maîtresse, épouse, mère, secrétaire, infirmière : il n’est rien que ne fit Cosima pour le dieu Wagner, son dieu. Accompagnant fidèlement son grand amour, elle donne l’image d’une force à toute épreuve. Après bien de la patience pour endurer les revers de fortune, les insuccès et les frustrations du compositeur, elle assista comblée ensuite aux triomphes de son époux.
Son fameux Journal, qu’elle tint de 1869 à 1883, retrace tous les événements de la vie du couple, des plus petits (le sommeil de Richard ou la nourriture des animaux) aux plus grands (le festival de Bayreuth).
Elle entretint une riche correspondance avec les plus illustres personnages ayant fréquenté Wagner : Louis II bien sûr, Friedrich Nietzsche, qui semble-t-il éprouvait un penchant amoureux pour la maîtresse de Tribschen, Judith Gautier, Gottfried Semper, Arthur de Gobineau et tant d’autres…
Elle essaya ainsi d’amadouer le roi Louis II pour le décider à venir en aide à son époux. En effet, le roi avait été froissé par les mensonges de Wagner sur ses relations avec Cosima. De plus, il attendait avec impatience la livraison des deux derniers opéras de La Tétralogie.
Ceux-ci tardant à venir, Louis II décida que les premières des deux opéras L’Or du Rhin et La Walkyrie seraient données à Munich. Elles eurent lieu respectivement le 22 Septembre 1869 et le 26 Juin 1870, ce qui froissa Wagner.
C’est cet événement qui décida de l’histoire de Bayreuth, Wagner cherchant un endroit où il pourrait faire représenter sa Tétralogie dans les conditions qu’il souhaitait .
Ce fut la fin de l’idylle à Tribschen, et le début de l’histoire de « Wahnfried », villa dans laquelle Wagner, Cosima et les enfants, s’installèrent le 18 Avril 1874. Commentant la lutte pour terminer le bâtiment du Festspielhaus, Wagner dit à Cosima : « Chaque pierre est rouge avec mon sang et le vôtre».
La gardienne du temple
Lorsque Richard Wagner mourut à Venise le 13 février 1883, Cosima, détruite par le chagrin, ne se détacha plus du cadavre. Elle s’allongea à ses côtés, muette, comme elle le fit sur le cercueil, au jour de l’enterrement de Wagner à la Villa Wahnfried. La veuve s’enferma dans son deuil. Il lui fallut de longs mois pour accepter de sortir de son isolement.
Cosima survivra néanmoins quarante-sept ans à Richard. Durant cette période – qu’elle n’avait pas elle-même envisagée – elle se consacra exclusivement à la défense de l’oeuvre de son époux. En effet, elle sut mener à bien l’intention initiale du compositeur, à savoir créer un festival durable, régulier, permettant l’exécution des drames musicaux wagnériens. Allant jusqu’à se heurter à de fortes résistances quand elle osa faire représenter sur la scène de Bayreuth les drames de Tristan, Les Maîtres chanteurs, Tannhaüser et enfin Lohengrin sur une scène qui n’avait vu que le Ring et Parsifal. Avec des succès tout comme des échecs : quel courage, quel investissement pour perdurer dans son œuvre lorsque, au pire de cette vague, Tristan fut représenté devant deux cents spectateurs à peine.
Sa fidélité inaltérable à l’œuvre de son époux transforma par ailleurs Bayreuth, initialement temple de la nouveauté, en mausolée. Elle écrivit à Hermann Levi : “ Il nous faudrait bannir tout élément réaliste, de caractère conventionnel et banal, au profit d’une convention supérieure, qui est le style”. Partant de là, elle bannit toute expression spontanée des artistes, sclérosa et figea le jeu, transformant Bayreuth en mausolée et arrêtant le temps.
Ses enfants se devaient eux mêmes d’être à la hauteur de l’héritage. Spirituel s’entend, puisque l’héritage matériel était destiné à Siegfried, le seul à porter le nom de Wagner. Cosima a sans doute aimé ses enfants, mais elle a déversé sur eux ses sentiments de culpabilité. Elle a étouffé ses filles, et leur a demandé de s’effacer au profit du fils, Siegfried, qui lui-même a eu bien du mal à exister ! Impossible de faire un pas hors du chemin tracé. Isolde eut la mauvaise idée d’épouser un chef d’orchestre suisse, Franz Beidler. Il fut chassé de Bayreuth par Cosima qui craignait la concurrence pour son fils Siegfried. Furieuse, Isolde réclama alors sa part d’héritage. Cosima alla jusqu’au procès pour lui dénier l’ascendance wagnérienne. C’est une von Bülow ! Isolde perdit son procès en paternité et mourut de la tuberculose, en 1919, abandonnée par sa famille et son mari.
Mais cette poigne de fer qui étouffa sa descendance fut certainement ce qui permit à la matriarche de prendre les rênes de Bayreuth. Et cela se fit dans la douleur ; d’origine française et femme : deux obstacles majeurs à son adoubement.
Les « Gardiens du Graal », les wagnériens, s’opposèrent de toutes leurs forces à cette succession. Liszt ou Bülow auraient été plus de leur goût. Mais Cosima l’emporta. Pour sauver Bayreuth, elle déploya toute son énergie. Mais son erreur consista à croire que pour imposer les œuvres du défunt, la seule voie fut la fixité, l’embaumement. Elle imposa un style de scène et de chant unique.
Si Cosima laissa les rênes du Festival à son fils Siegfried en 1908, elle ne mourut qu’en 1930 à l’âge de 92 ans ; Siegfried, lui-même, décéda quelques mois plus tard à peine plus tard. Une nouvelle ère allait s’ouvrir pour un Festival qui sera désormais placé sous la protection – et la direction artistique – du IIIème Reich…